Press(ion) *

Les journalistes du monde entier célèbrent, aujourd’hui, leur journée  dédiée
à la liberté d’expression. Ce sera une halte pour mesurer le chemin parcouru et quantifier les acquis arrachés. Ailleurs, la ferveur le disputera à l’engagement. Chez nous, c’est un marronnier expédié via un tournoi de… football et un micro portable offert au journaliste vainqueur du concours officiel.
Le ministère de tutelle à beau jeu face à une corporation à ce point déconnectée de ses propres réalités. Souvent mal formée et désinformée, le journaliste algérien se contente du peu.  Il joue, à son corps défendant, les seconds rôles de relayeurs d’une littérature officielle qui pollue à satiété les luttes démocratiques.  Il faut admettre que le courage et l’engagement désintéressés passent pour être des denrées rares dans notre corporation. Les pressions judiciaires et le pouvoir magique de l’argent on fini par phagocyter bien de plumes jusqu’à à obtenir le tarissement de l’encre.  En ce 03 mai, il n y a sans doute pas de quoi pavoiser pour nous, journalistes algériens. Même si certains bien pensants voudraient nous paver l’enfer de bonnes intentions par ce statut …quo présenté comme acquis extraordinaire !
Tout se passe comme si le salut des journalistes Algériens résidait dans la promulgation d’un statut fut-il déclassant, asservissant.
Il est d’ailleurs significatif de noter que le législateur ait eu recours à la formule de «décret exécutif fixant régime spécifique» pour qualifier juridiquement ce qui est présenté publiquement comme un statut. Cette minoration sémantique du texte n‘est elle pas elle-même une preuve d’une négation d’un statut, un vrai ?
Concrètement, et si on devait juste faire un calcul arithmétique des procès en série intentés à nos confrères durant l’année 2007, on s’aperçoit que la profession est réellement dans la gueule du loup. Au grand dam de ceux qui jaugent la liberté d’expression à l’aune du nombre de titres jetés sur le marché.
Or, l’infamante pénalisation du délit de presse- clé de voûte de  la reconquête de la liberté d’expression-  encore en vigueur, est balayée par quelques supplications tribunitiennes sans lendemains. Il est donc illusoire d’attendre d’un régime foncièrement liberticide quelques gestes attendrissants à l’endroit d’une corporation qui continue de vivre de ses formidables victoires passées.
C’est sans doute la première fois que le pouvoir politique évolue sur du velours avec le monde de la presse à quelques exceptions prés heureusement. Après la «normalisation» des partis politiques, les autorités s’attachent, avec beaucoup de succès du reste, à mettre au pas la presse. Et quand on dépend financièrement de la manne publicitaire de l’Etat, donc du pouvoir et des boites privées apparentées, la liberté d’information et le droit de savoir deviennent fatalement résiduels. Le vrai combat est là.

Hassan Moali

*Cet article a été publié comme éditorial dans EL Watan

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